regardez là-haut
tout en haut
non plus au haut encore
abattez les murs s’il le faut
creusez les plafonds
oubliez les arbres et les buissons
qui murmurent pour vous distraire
ne regardez que le ciel et voyez :
il pleure
il pleure alors qu’il ne tombe
aucune goutte de pluie
ni neige ni brume ni rosée
le ciel pleure et il a le visage en feu
ses larmes crépitent sur ses joues
et laissent une cicatrice
qui traversera ses rides
comme on enjambe un ruisseau
continuez de regarder
ne baissez jamais les yeux
oubliez vos pieds, il sont ancrés dans la terre
enracinés ils ne risquent rien
vous sentez la caresse
des brins d’herbe sur vos chevilles
et la piqûre des chardons sur vos mollets
c’est suffisant pour vous rappeler
où vous êtes et où vous resterez
attachez vos pieds au sol
et lancez vos yeux vers les étoiles
ce qu’il y a entre les deux
finalement importe peu
à quoi servent des mains
si elles ne ne peuvent que se battre
à quoi sert une bouche
si elle ne peut que cracher la haine
à quoi servent des jambes
si elles ne peuvent que fuir
à quoi servent des oreilles
si elle ne peuvent apprécier le silence
finalement il ne reste que le cœur
qui bat encore mais qui s’endort
regardez encore, les étoiles vous disent où aller
vous y arriverez sans peine puisque vous n’êtes
qu’un regard, une âme à part, une trajectoire
délestée du corps, de la douleur et de l’impuissance
alors soudain vous n’avez plus peur de la mort
parce qu’elle non plus n’a plus peur de vous
parce qu’elle vous cherche et ne vous voit plus
maintenant vous pouvez fermer les yeux
vous serez toujours ce garçon
qui jette son vélo au pied d’un arbre
vous serez toujours ce jeune homme
qui s’essuie le front, satisfait de sa journée
vous serez toujours cet homme
qui s’endort en souriant parce qu’il sait ce qu’il a vécu